La sincérité poétique d’Aboubacar Saïd Salim
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La sincérité poétique d’Aboubacar Saïd Salim


Avec Mutsa mon amour, paru le mois dernier aux éditions Cœlacanthe, Aboubacar Said Salim, signe un recueil de poèmes qui pose sur les choses du monde, de la région sud-ouest de l’océan indien, de son pays l’archipel des Comores et sur les êtres qui comptent à ses yeux, un regard où se mêlent l’amour, l’admiration et la dénonciation.

Ce recueil regroupe des poèmes qui étaient publiés il y a longtemps et des nouveaux. Selon l’auteur le titre Mutsa mon amour, qui est en fait un hommage à la ville de Mutsamudu à Anjouan, a été choisi pour des raisons esthétiques et patriotiques. « Nous sommes souvent les écrivains ou les poètes de nos îles respectives ou même de nos régions. Je voulais rompre avec cette habitude, et n’étant ni d’Anjouan encore moins de Mutsamudu de par la naissance, je le suis de cœur », confie Aboubacar Saïd Salim qui est né à Moroni. Le chef lieu de l’île d’Anjouan où le poète a vécu pendant quatre ans a, ainsi, droit à trois poèmes qui lui sont spécialement dédiés : « Mutsa, mon amour », « Mutsa, ma martyre » et « Mutsa ma rebelle ».

Les thèmes abordés dans ce livre préfacé par le poète Camerounais, Paul Dakeyo, sont variés. Les mots que l’on retrouve sont tantôt douloureux, tantôt doucereux à l’image des expériences multiples dont l’auteur a vécues. Ils expriment « la révolte contre les inégalités, les mensonges des grands de ce monde et des politiciens », explique-t-il, lui qui dit dénoncer également « la violence préméditée contre des peuples souverains pour des intérêts sordides ». Il met en même temps en exergue « ceux qui ont réussi à garder leur dignité grâce à leur travail et aux efforts de leur gouvernants. C’est le cas de Maurice, l’île voisine des Comores à laquelle j’ai consacré plusieurs poèmes », avance l’auteur.

Le ton est donné dès les premières pages de ce recueil de 54 poèmes étalés sur une centaine de pages. Ainsi dans un poème intitulé Je te hais d’amour, l’auteur s’adresse à son pays en ces termes : « Comores tu as fais de nous/ La risée du monde / Tu nous as rendu zinzin / Des vrais patins / Comores, tu as uniformisé nos pensées / Et nos actions ne visent / Qu’à monter au plus haut du mât du pouvoir /Pour arracher cinq vices primordiaux: / Vacuité, vanité, voracité, veulerie, vol». Des vers qui sonnent étrangement comme un écho au mouvement citoyen en cours à Moroni, capitale des Comores, dont on retrouve Aboubacar Said Salim parmi les principaux animateurs…Trois pages plus tard et dans la même veine, dans le poème Ultimatum, on peut lire ceci : « Débout ! Nous sommes là / Pour vous dire/ Assez ! » (…) « Parlons de ce partnership / Qui nous chipe tout ce qu’il peut/ Matière grise et première du sud vers le nord / Comme un aimant !/ Et en contrepartie nous inonde d’armes / De dettes et de larmes ! ».

Des mots qui démontrent le franc parler de ce poète, car, soulignons le, garder sa langue dans la poche, Aboubacar Saïd Salim, ne sait pasfaire. C’est sans doute son insoumission et son militantisme qui lui ont valu de connaitre les affres de la prison sous le régime des mercenaires. D’ailleurs, une grande partie des poèmes qui figurent dans ce recueil ont été écrits dans la solitude de la prison. « Certains poèmes ont été inspirés par des évènements vécus, beaucoup de poèmes ont été écrits en détention et portent souvent à la fin le terme Boirodjou qui est une fusion du camp Boiro lieu de tortures en Guinée Conakry du temps de Sekou Touré et Voidjou, lieu de tortures aux Comores du temps d’Ahmed Abdallah et des mercenaires », nous confie le romancier. « Pour moi l’écriture est une thérapie contre toutes les agressions de la vie, mais aussi une façon de « se donner à soi » comme dirait Montaigne », confie-t-il en guise de conclusion. Mutsa, mon amour donne l’immense plaisir d’un langage riche, presque gastronomique. A lire et à faire lire….

Faïssoili Abdou

Aboubacar Said Salim

Mutsa, mon amour et autres poèmes

2014, Cœlacanthe, 100 p.


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